mercredi, novembre 18

Les fables contemporaines épisode 2


J’ai entendu parler d’un médecin…
Il guérirait la lèpre et soignerait les tumeurs, ils disent qu’il sait réparer les cœurs.

J’ai entendu parler de cette machine qui sait aimer et caresser les cheveux, et offrir une épaule sans partir un jour, garantie de dix ans, encore mieux que les statistiques humains, j’ai entendu parler que ça marchait très bien.

J’ai entendu parler de cette île où l’on va en toute saison et dont on revient rarement, où les cocotiers donnent des pêches, où l’eau est toujours fraîche, là où on ne meurt jamais.

J’ai entendu parler de l’amour et de la fidélité de loin en loin, je connais nos mythes urbains.

On leur ment quand ils sont petits, on leur dit que le mouton meurt dans les rubans de satin et qu’après l’orage, le soleil ne tarde pas, et que tous les oiseaux volent et qu’on sera toujours là pour eux…on a grandi, on reconnaît les râles de l’agonie et les tsunamis sans lendemain et le fioul dans les ailes blanches et on sait qu’il y a des aujourd’hui sans demain.

J’ai entendu parler une fois, de cette princesse endormie, qui attend et qui finit toujours par avoir ses enfants…et de ce nain souriant que la grotte ne dénigre pas…et des arbres qu’on ne coupe pas, et d’une planète à jamais bleue, et des jours toujours heureux, et des mois et des 24 heures…on m’a gavé de l’illusion du bonheur.
J’aimais croire avant, que tous les bobos disparaissent avec les baisers, que l’amour ne tarit jamais…j’aimais croire qu’il n’y a pas de vie sans printemps et que je savais reconnaître un sourire qui ment.

J’ai entendu moi aussi parler des monstres qui ne faisaient que grogner ou manger les enfants, je ne savais pas qu’il y en avait qui leur volaient leurs âmes…je ne savais pas qu’on pouvait haïr sans raison, et qu’on pouvait trahir et qu’on pouvait partir, sans un châtiment.

L’illusion du bonheur est comme le bonheur, reposante, surpuissante dans le fantasme de son éternité, l’illusion du bonheur est comme les sourires qu’on avait dans nos photos d’école, comme nos vieux albums…

J’ai entendu parler des rois cléments, des milles et une nuits, des sommeils sans rêves, des fleurs, des guis…je savais dessiner un soleil, et une immense maison, je savais colorer l’arc en ciel, je riais du beau temps.

mardi, novembre 10

Son gouffre de souvenirs


Viennent mes métaphores, viens ici poésie, il est passé minuit et je renâcle à pleurer, je renâcle à dormir, il me reste écrire.

Viens ombre hideuse à mon cœur insolent viens me couvrir que ton étreinte m’éreinte et que je puisse souffrir pour qu’enfin je trace des lignes de plaisir.
Rien ne m’appartient, le dictionnaire me nargue et l’Académie me rit mais je joue de leurs règles, je blasphème le français de mon prêche…toi LE mot impur, je ne peux rien faire sans ton absolution, je ne peux pas trouver le sommeil, ni trouver le mou, ni trouver le dur.

Toi Le mot impur, je me targue de t’ignorer, je me vante de te narrer, toi le mot tu portes ma désolation et le secret d’antan, tu me purifies et m’abjures.
Elle est triste ma prose, et je n’ai jamais su la faire poésie, mes cerceaux fuient d’amour pour elle, de haine vers elle et elle, n’a jamais fui.

Viennent vers mois les saules pleureurs et des visions de lac jonché de feuilles mortes, viennent vers moi les plaines, viennent vers moi les plaies et les amours inertes de l’aube qui rêvassait. N’oubliez pas le mot, oubliez un peu l’image, son silence ne vous tue pas ? Son silence ne vous brûle pas ? Des poèmes que je ne sais pas m’emplissent de bruit, et des chuchotements de bar, des confessions d’un soir, je ne suis que son, je ne suis que son…gouffre de souvenirs, et je l’enterre mille fois avec les mots pour le dire.