samedi, décembre 11

Elle


Elle

Griffonne sur le mur du cœur des barbouillages d’enfant, des oui des non, des lettres enlacées, des je t’aime, écorce entamée.

Elle

Lacère la paroi muqueuse de son organe vital, perturbe le souffle nodal, estampille sur le vrai, la douloureuse inscription fer rouge, fer blanc.

Je tatoue sur ma face, body art, il fallait réfléchir à deux fois, à deux pas, mais les « il fallait » sont des regrets affligeants et infligés.

Je reprends le pronom le vrai, j’assume que c’est moi, la bêtise en moi, j’assume que c’est ma main, que c’est ma vie.

Chantonne dans le bain une chanson de Disney, régresse vers un stade oral, se laisse couler, émerger traverser par les effluves des roses, mais les odeurs ne sont pas des machines à temps. Rien n’est comme avant.

Que la neige tombe dehors que tout soit blanc, que ce décor change des scènes d’enfance.

Elle

Ne peut pas mettre un père dans les rues de Paris, ne retrouve pas les repères ni les orangers et les hêtres.

Finalement, les parenthèses parisiennes, les bistrots de minuit, les métros et les rails, les Haussmann en overdose, tous ces décors incongrus sont à consommer avec modération.
Ne pas se laisser gagner par Sartre, ne pas se laisser aller avec la Seine, se fixe sur le souvenir d’été de la mer, des rires des neveux et à l’odeur d’une mère : mélange de sel et de parfum.

Elle

S’accroche au souvenir de la vague du sable persistant, du soleil, du téléphone muet.

Elle

Suspend son regard sur les vitrines brillantes, rouges, pleines de cadeaux et des robes qu’elle veut.
Essaie les parfums, les nouvelles senteurs, les poivrées les musquées, se noie dans le chocolat d’une crêpe trop chaude, glisse sur les feuilles mortes, abîme ses yeux à lire de loin, ses talons, son manteau.

Je reprends mon pronom et ma place et le fil d’une conversation, chantonne un Perretta re-visionne une scène de « mange prie aime »…
Je voyage sans voyager.

La neige tombe autour de moi, son froid m’enveloppe comme un manteau, son calme filtre les brouhaha.

Vivre dans un tableau, se prendre en photo, le sourire toujours et se laisser aller dans la bonne humeur des autres, apprécier le souffle et les orteils qui gèlent.
Le bonheur est ça, des éclats de voix, d’eau chaude, de lumières accrochées dans des dédales incertains, le bonheur est flash ou ne l’est pas.

J’arrête l’introspection et m’ouvre vers le dehors, dépasse mon portail et ma haie, retrouve l’insouciant et le gai. Comme c’est facile de se rendre triste en hiver, comme c’est facile d’accuser Paris et son ciel gris.

Il me faut cette toilette et ce parfum et cette magnifique breloque, et ce livre et ce poème et ce film « biutiful », on se laisse aller dans le noir espagnol.

Je reprends mon pronom, ceci n’est pas triste, n’est pas faux n’est pas forcément joyeux, une douce schizophrénie.

Moi vit moi respire moi a froid et moi oublie.

dimanche, octobre 3

laisse infuser



Tout passe, croyez-moi, du haut de mes "13 fois deux" années de survivance…

Pas confrontée au froid, (exceptionnellement robe en soie sous manteau de printemps un temps de décembre).
Pas confrontée à la faim, (exceptionnellement deux tentatives ratées de régimes sans glucides protéines gras et eau compris).
Pas confrontée à la pauvreté, (exceptionnellement les dernières semaines du mois où tous les distributeurs se liguent contre ma carte)...
Pas confrontée à la guerre, (exceptionnellement derrière l’écran avec un manque de discernement pathologique de la mince frontière entre l’écran et le salon).

Confrontée au deuil, à la perte, à l’échec, confrontée au doute, à la peur, à la trahison, confrontée aux disparitions.
Rien de grave-en somme- rien qui déroute.
Confrontée à l’incertitude des matins gris, à l’exil quelquefois dans les rues de Paris.
Confrontée à l’injustice des paroles blessantes, et à la justesse de mes quatre vérités…

Aux aléas des filles, comme un amour avorté.
Aux aléas des filles comme poursuivre des chimères… la douleur quand je m’épile, la douleur quand j’étire ma fibre capillaire.

Et la douleur quand on m’abandonne à l’autre coté du trottoir sans un bonsoir, la même chose en somme…
Et tout passe pourtant, les douleurs débiles aux douleurs sans traces, aux petites meurtrissures et aux bleus des genoux, comme les messages qui résonnent sans échos, comme le vide autour, comme l’abysse, comme l’océan…
Comme tout ce qui de grandeur, devient effrayant.
On prie pour que ça s’arrête, pour qu’on aime, pour qu’on nous aime, pour que rien ne repousse, pour que rien ne s’écorche, on prie pour que ça s’abîme, que ça se répare, pour les lissages miracles, et les présages. Pour les contes de fées, et les parties de chasse, pour le haut imprimé, pour la bonne pointure, et la bonne mesure, pour que rien ne se perde, pour qu’on oublie surtout.
Confrontée à tout.

Du haut de mes "petits" 25 ans, je sais que de la petite éraflure au chagrin écrasant, il y a une dose de patience d’abstinence de volonté derrière, qu’on puise je ne sais où ni par quel miracle, on puise et puis c’est tout.
Et on laisse faire le temps, jusqu’à ce qu’on déglutisse et que ça passe finalement.

Je ne me souviens plus de mes bleus, je sais que je me suis fait mal une fois en vélo.
Je ne me souviens plus des traces, je sais seulement la place, qu’occupe un souvenir. Rien de grave, il y a pire.
Confrontée à rien dans mon cocon d’ivoire, fille de peu de foi, j’ai tellement eu de chance, d’amour, j’ai tellement eu le choix.

Je souris à ce monde, au soleil le matin, je dépasse ma mièvre inquiétude, mon mièvre souvenir, mes mièvres émois.
Je souris à ce je ne sais combien de temps, devant moi, je souris aux passants.
Je relativise mon mal, et mon bien évidemment.

Je sais que tout passera comme est passé le bonheur des fois, comme est passée la larme et le sanglot et la grimace, comme est passée la souffrance, comme est passée l’enfance.

Je sais qu’on oublie mais, et que dans les brumes survient un éclat de voix, un rire déchirant de vie, de bonheur. Dans les plus sombres abîmes on entrevoit des prairies de candeur et des promesses de possible.

Et quand on croit que rien ne viendra tarir un flot, vient le ruisseau et puis vient la plaine verte et la douce torpeur d’après les tempêtes et de l’amour là où on ne pensait pas, quand un voile d’affection te tire du mal être
Et les liens du sang que rien ne peut rompre, et les liens du cœur, tout interdit de céder quand le malheur donne du malheur, et qu’on prenne la peine de tomber pour toi pour sauver ta peau et qu’on prenne la peine de pleurer parfois pour que tu pleures juste un peu.

Du haut des sommes astronomiques de mes instants et dans le désert d’une méditation, je me retourne et observe le couloir et les portes entrouvertes et je souris nostalgique, fille ingrate, pleurnicharde, trop romantique, tout va bien, tout va bien, je me berce de la lumière et de la musique et des voix familières, tout va bien et même si quelque chose dedans casse, je sais, je sais que tout passe.

mercredi, avril 21

Ils "volcan" les avions ? *


Ils volent quand les avions ? couloirs aériens dissous, des millions et des millions d'euros envolés là où ne volent maintenant que les oiseaux.

Icare, Icare ! Si tu savais qu'on finirait par comprendre qu'on se brûle les ailes au voler au dessus des nuages enfumés...les nuages islandais.

Revanche divine d'un Pays ravagé par la crise, allumons des cierges à ces saints qu'on croyait morts, réhabilitions leur olympe de Geyser, et le Marteau de Thor.
Monsieur Eggerston dit qu'il y est pour quelque chose, un peu de soufre, un peu de chlore, rendons lui sa BM format XL et il nous rendra le ciel.

Qui n'a pas quelque part, un parent, un ami coincé sous le firmament, dans un pays qu'il veut quitter maintenant, même s'il y fait beau, même si l'eau, est à la bonne température, l'embargo dure...

Hilarant, de voir ce ciel bleu sans point blanc, hilarant de constater que le monde a repris en quelques jours ses gigantesques proportions.

Tout est insurmontable : les mers, les Fjords, les Alpes et même les quelques kilomètres qui séparent des présidents d'un cimetière.

le printemps de Varsovie a été sanglant aussi, pas de roses hollandaises pour un mort aux ailes brisées, pas de chocolat belge, pas de chocolat français, même le cristal de Bohême n'y est pas, pas de brownies, pas de pizza.

les "naufragés du ciel" remplissent les aérogares, les âmes, et leurs valises s'égarent.

En zone internationale, on est nulle part, des caravanes dans un désert...
Nuage à l'ire si théâtrale et belle, rendez-leur le ciel !