jeudi, février 28

footez-moi la paix !


quelqu'un m'a dit un jour que les tunisiens survivent par le foot ! c'est pas faux, c'est même honteusement vrai...décortiquons la journée type d'un tunisien moyen ou pas moyen, entre les articles de foot dans les journaux (d'ailleurs il ne lira que ça) et les deux chaînes de télé qui se battent en duel, et qui transmettent leurs émissions en jours alternés, comptons en plus les heures passés au café à regarder les matchs du championnat, des champion's league, européens, américains, africains, du championnat du monde et les matchs amicaux, des championnats espagnols, italiens, français, je n'oublierais certainement pas le temps passé sur les consoles de jeu, les ordinateurs, les portables, tout ce qui a un écran peut forcément abriter un ballon. Combien reste-t-il de temps pour faire autre chose ? pour les courses du dimanche, pour les sorties en famille, pour les visites à mamie? encore plus grave pour le boulot?
Marx s'étant trompé de drogue, je dirais que le foot est par excellence l'opium du peuple, que demander plus qu'une transmission en direct des meilleurs matchs de la saison, que demander de plus que des cafés avec écran géant ? noyé entre les jambes des joueurs mondiaux et médiocres, suivant d'un œil enfiévré la course folle d'un ballon, le tunisien n'aura pas le temps de se révolter contre le prix du lait, ni la flambée de l'essence.
cette MST (maladie socialement transmissible) résiste à tous les antidotes, le plus court chemin vers le cœur d'un homme, passe forcément par un stade.

mercredi, février 27

je suis écolo, je roule au café !


Bon, je sais pas si c'est une énergie renouvelable ou pas, mais je roule au café...Alors ça commence a huit heures, réveil pénible, nuit courte, longue soirée scotchée à l'ordinateur, les yeux qui piquent, je ne guéris de ma myopie qu'avec ma première tasse de café...ouf, je souris, je m'habille, enfin commence la journée, et puis y'a la récré de 10 heures, on voudrait pas rester seule quand tout le monde est à la buvette, et "un direct" pour la demoiselle, déjà je me sens encore mieux, puis vient midi, quand le déjeuner est fini, faudrait bien combattre les relents des siestes estivales, je bosse moi ! un café pour digérer et puis six heures passées, la fin des cours, et on se retrouve entre copains pour disctuter...dans un café. déjà je rentre fatiguée, y'a maman qui cuisine, j'ai encore ce test demain faudrait que je veille et que je révise, je tiendrais comment toute la soirée ?? bien sûr avec un café...ma caféine contient un peu de mon sang...je sais c'est grave, et ça m'arrive de suivre des cures de désintoxication, mais je retombe toujours en dépendance, je me dis c'est pas bien grave, c'est pas le nicotine tout de même ! mais ça m'alarme de dépendre d'un liquide chaud et noir...il faut dire que ça rappelle un autre carburant, l'or noir, d'ailleurs pour l'anecdote, le café est la seconde marchandise échangée dans le monde derrière le pétrole, donc ce serait plutot un combustible et non une drogue, et puis même si on lui attribue plusieurs méfaits, il apporte quand même des minéraux (potassium), de la vitamine PP et bien sûr de la caféine qui stimule le système nerveux. Bon, je sais il diminue aussi l'absorption de certaines vitamines B et du fer peut également "perturber" le sommeil. Ce qui est encore plus drôle, c'est que la consommation du café (tradition arabe au départ) fut interdite deux fois dans l'histoire, la première au Caire par le gouverneur, qui la rétablit sous menace de rébellion et une autre par le pape en personne qui la déclara par la suite boisson officielle pour lui voler la gloire des "infidèles" (les musulmans). donc c'est un acte culturel de la boire, c'est pas italien, non non non ! d'ailleurs la variété la plus appréciée (et la plus chère) et l'Arabica !
je me sens mieux tout d'un coup, on se retrouvé au café ??

je jeune, tu jeunes, ils sont jeunes....


on va me taxer de paradoxale, mais je suis une personne qui aime les justes milieux, et je condamne encore, je condamne tout ce qui, à mes yeux est faux, ou faussé, imposé ou importé...je suis une jeune de 22 ans, je vis ma vie, j'ai des buts, je crie, je ris, et je m'insurge...
je suis une jeune tunisienne, n'ayant jamais aspiré à abandonner sa peau ou son nom, n'ayant jamais cessé un jour de croire dans ce pays ensorcelant...j'avais écrit et j'avais dit que j'ai peur pour ce pays, aujourd'hui encore, cette peur est là et change de nom et change de sens.
je vais tous les matins à cette école que j'ai rêvée toute ma vie d'enfant, j'y vais, je vois, j'ausculte ces gens qui suivent ce même chemin, je sors parfois dans nos avenues, dans nos cafés et du balcon, je contemple dès l'aube les voitures zigzaguantes et j'essaie de donner un nom à ce mal qui ronge ces jeunes...en quel nom, en quel non ??
je ne veux pas juger ces autres ni faire endosser le crime à ces parents qui dorment quand leurs enfants saouls tuent des gens innocents sur les routes de retour...
je me pose des questions...et mes points d'interrogation ne se dissipent pas à l'aube, dans l'insomnie des nuits d'été quand la route de la Marsa ne désemplit pas...
où allons-nous, qui sont les coupables, tant de pourquoi et de comment, dans tous les sens, et je n'ai pas de réponse...
nos parents à mon âge peuplaient leurs nuits de rêves fous, de construire ce pays, de le conduire, de le mener, de le nourrir et de l'alphabétiser, nous sommes une génération qui n'a jamais combattu pour apprendre, qui n'a pas connu la faim, ou alors rarement, une génération à qui tout est arrivé facilement. génération parabole qui a appris l'italien bien avant l'arabe, qui a toujours porté le jean mais jamais une djellaba...tout ceci n'a pas de sens, ce qui importe au fond, c'est l'absence même de sens à une vie, l'absence de but, d'ambition, l'absence de ce feu brûlant qui voudrait tout changer, tout faire avancer...nos jeunes et je les côtoie, ne pensent qu'à leurs prochaines soirées, aux filles qui danseront sur le comptoir, aux bouteilles débouchées, nos jeunes ont depuis longtemps perdu l'espoir, ils croient qu'on ne peut plus changer les choses, que tout est dit, que tout est fait...
il m'arrive de penser pendant ces nuits d'insomnie au futur de nos enfants, où les élever ? comment les protéger de l'agression du net, comment les protéger de la débauche, comment faire d'eux, des tunisiens, lorsqu'ils vivent en terre étrangère, comment leur interdire ces coutumes qui s'instaurent et qu'on ignore?
tous ces opiums de silence, ces pertes aux milieux des foules, ces stroboscopes qui aveuglent, ces mensonges, les gueules de bois, la voiture éraflée, l'odeur âcre des alcools et des fumées, n'auront servi à rien le jour où on demandera à ces jeunes insouciants de dessiner leur horizon, le jour où ils auront à élever leurs enfants, quand il leur sera dit, qu'ils vont construire ce pays.

mardi, février 26

j'ai peur pour ce pays...


J'ai peur pour ce pays pour ces regards qui transpercent, pour la peur, pour la Perse qui vient en Tunisie... j'ai peur pour ce voile que nos aïeules n'ont jamais porté qui défile dans les rues, et dans nos supermarchés, peur pour ces barbes qui cachent dans chaque poil de l'intolérance et pis, de la haine, de la peine, les déceptions d'autrui.
je m'insurge et j'accuse ces cheikhs enturbannés de profaner l'islam pire que les hérétiques, d'exporter la terreur et non une religion de cathédraliser nos mosquées, de noyer le désespoir dans la peur et la panique...j'accuse ce peuple de s'éloigner de l'essence et s'aliéner, de vivre dans un passé qui devient si lointain qu'il n'en reste que des ruines...à ceux qui pensent que islam rime avec costume, je dis avez-vous un jour cherché comment notre prophète a converti des milliers en quelques années ? comment-a-il uni une Arabie qui s'entretue ?? est-ce en faisant miroiter le voile à une femme ou est-ce en lisant alors qu'il était illettré ? je demande à ces marchands des ténébres de me citer les valeurs de l'islam...
j'accuse les tunisiens de courir dans tous les sens sauf la voie d'où ils sont venus, vers l'occident dans des barques de fortune, ou vers l'orient dans des mètres de tissu, je les accuse de crime contre leurs cultures et leurs passés...
j'ai peu pour ce pays, pour 1957, pour la femme au bureau...j'ai peur pour le combat acharné qu'ont menées nos mères. mais je garde espoir là ou il n'y en a plus, un jour ou l'autre on comprendra peut-être que jamais l'extrémisme n'a été une solution, n'avons-nous pas le modèle afghan, un peu moins l'Iran ?? et les récits d'autrefois de l'Abasside empire, ou de la flamboyante Andalousie, qui les a un jour lus ? dans quel monde et au nom de quoi, ces gens ont-ils vécu ? les mosquées dorées étaient pleines et pourtant, des poètes vantaient les beautés et l'amour non la haine...et ce passé n'est plus, notre présent vaut mieux que nos lamentations.
j'ai peur pour ma Tunisie qu'elle ne s'enlise dans ses paradoxes, qu'elle ne dérive, qu'elle ne s'oublie..j'ai peur pour mes concitoyennes de l'horreur de la réclusion et du non choix et pour mes concitoyens de l'intolérant et de l'éternel non, de l'odeur du moisi d'un esprit renfermé...
je m"indigne, je m'insurge mais je ne pourrais jamais contredire la liberté d'un choix la liberté d'une tête nue ou voilée, la liberté d'être libre ou de s'enchaîner...

du dubai en Tunisie


le projet est depuis longtemps d'actualité, l'intrusion de Sama Dubai en Tunisie, je parle d'intrusion parce que le projet est Dubaïote a 100%. de l'architecture à l'ingénierie, restent les simples maçons qui vont transporter les débris des chantiers et puis la cimenterie locale qui va fournir la matière première. 2010 et l'ouverture de la Tunisie au marché mondial, 2012 et l'achèvement de ce projet pittoresque...du Dubaï en Tunisie, comment va-t-on intégrer ce monstre d'urbanisme high-tech, d'architecture colossale dans une ville cosmopolite, capitale certes mais qui a toujours construit en petit et en horizontal, Tunis by night ne sera jamais la même, a-t-on prévu la spéculation foncière qui va en résulter? Les architectes crient au sacrilège ! Ils dénoncent la non-intégration, le libéralisme, la colonisation masquée, tant de concepts, d'idées et de faux crimes qui n'auront servi à rien face au mutisme de l'État. auraient-ils pu faire mieux ? ou est l'intégration dans l'architecture Tunisienne, dans ce style hybride qui bordent nos routes ou dans ces faux moucharabiehs ? le capitalisme est la, et ses lois sont sans appel, c'est au plus compétent, au plus créatif, au plus commerçant, c'est simplement vendre un glaçon à un esquimau. la loi du marché dit que la libre concurrence est là, la Tunisie arrêtera dans deux ans de protéger ses architectes, ses ingénieurs, ses entreprises de l'extérieur et les jettera dans l'arêne des fauves, est-ce injuste ?? je ne le crois pas, du Dubaï en Tunisie ?? pourquoi pas ? et pourquoi pas aussi, de la Tunisie à Dubaï ? arrêtons d'accuser les Autres, ces occidentaux qui possèdent le monde, ces rois du pétrole qui passent de lubie en lubie. prouvons que nous avons aussi une place au soleil, faisons mieux ! sinon, taisons-nous !

le temps des cerises




Quand nous chanterons le temps des cerises,
Et gai rossignol, et merle moqueur
Seront tous en fête.
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur...
Quand nous chanterons le temps des cerises,
Sifflera bien mieux le merle moqueur.

Mais il est bien court, le temps des cerises,
Où l'on s'en va deux cueillir en rêvant
Des pendants d'oreille !
Cerises d'amour aux robes pareilles,
Tombant sur la feuille en gouttes de sang.
Mais il est bien court le temps des cerises,
Pendants de corail qu'on cueille en rêvant !

Quand vous en serez au temps des cerises,
Si vous avez peur des chagrins d'amour,
Evitez les belles.

Moi qui ne crains pas les peines cruelles,
Je ne vivrai point sans souffrir un jour...
Quand vous en serez au temps des cerises,
Vous aurez aussi vos peines d'amour.

J'aimerai toujours le temps des cerises :
C'est de ce temps là que je garde au coeur
Une plaie ouverte.
Et dame Fortune, en m'étant offerte,
Ne pourra jamais fermer ma douleur...
J'aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au coeur.


un poème de Jean-Baptiste Clément juste pour la beauté des mots, le merveilleux temps dehors et puis aussi pour Mars qui approche, excusez mon romantisme d'un jour (la coupable se reconnaîtra).

samedi, février 16

chocolat

1kg/an par habitant, voila la moyenne mondiale. chocolat, eau amère des mayas, dont le cacao et la plante des dieux, boisson divine, graine divine. 12,3kg/an/habitant en Suisse...
autrefois produit de luxe réservée à la noblesse européenne, il est maintenant un produit pour tous, qu'on consomme sans modération malgré toutes les recommandations. chocolat, 550 kilocalories, soit le quart des besoins nutritifs journaliers d'une femme...alors qu'on le consommait du temps des aztèques avant la nuit de noces, on l'offre de nos jours pour la fête de l'amour. La marquise de Sévigné dit du chocolat, dans ses Lettres, qu’« il vous flatte pour un temps, et puis il vous allume tout d'un coup une fièvre continue », des siècles après, on lui attribue des vertus aphrodisiaques, l'effet anti-dépresseur, ou encore stimulant, puisqu'il contient de la théobromine et de la caféine, énergisant car a une forte teneur en glucides et en lipides...les juifs offrent à l'Europe le chocolat quand ils seront chassés lors de l'Inquisition, Hernan Cortès introduisit au 16ème siècle le chocolat en Espagne.
histoire d'un mets divin, dont les secrets furent tour à tour gardés dans les ruines mayas, puis dans les ateliers suisses, produit de législation, de controverse, diabolisé par les diététiciens, vantées par les médecins, produit masculin dédié à la féminité du monde entier, produit femme, à croquer, à déguster. le chocolat m'intrigue, lire son histoire c'est aller en parallèle de l'essentiel, pourquoi depuis longtemps dans la mésoamérique avait-on cru que ce sont le dieux qui l'ont envoyé, pourquoi l'a t-on sanctifié...ce péché mignon est le plus mystérieux de tous. l'Europe vient en premier, l'Amérique sa mère patrie, suit..puis vient l'afrique et enfin l'Asie, continent de l'abandon, des suicides, des combats, l'Asie, on ne sait pourquoi, méconnaît le chocolat, son plaisir leur est interdit, sa douceur contraste avec la misère Indienne, la rigueur chinoise, ou le sérieux Japonais...chocolat, mot aux résonnances d'un language du monde n'est plus ce produit vénéré, il est le rêve d'un enfant au détour d'un supermarché, le caprice d'une femme qui se retient à peine, la douceur interdite aux édentés...
grand cru à consommer avec modération, bienfait empoisonné, cadeau dérobé à la divinité.

dimanche, février 10

mes pas-envie du dimanche après-midi...


midi passé, le beau matin, gras disparait et le soleil du dimanche vire au gris, du moins c'est ainsi, que je perçois la chose. dimanche après-midi est laid, et si plein d'ennui, tu pourrais skier en été et bronzer en hiver, être à l'autre bout de la terre, ça te rattrape toujours cette grisaille d'un jour...midi passé, tout prend l'allure d'une journée qui traîne et s'égrènent, lentement, les douze coups de l'ennui, commence ma terrible litanie, mon râle, ma mauvaise humeur...j'ai pas envie, j'ai pas envie! j'ai pas envie d'un jus, pas envie d'un café, pas envie de bosser ou de réviser, pas envie de parler, ni rire, pas envie de répondre au monologue de maman, ni de jouer avec les neveux, pas envie de sourire, ni de voir la télé, même pas envie de pleurer, pas envie de lire ce roman qui traîne, ni d'écrire mes pensées obscènes. j'ai pas envie de ranger ni de mettre de l'ordre, pas envie de me faire belle, pas envie de sortir, pas envie de rester...j'ai envie de manger, mais pas envie de grossir, j'ai envie de gueuler, mais pas envie de parler! j'ai des envies de meurtre mais pas envie de bouger... je deviens xénophobe, claustrophobe, agoraphobe, tas de phobies et de pas-envie, et puis tombe le soir, sur ces longues heures de désespoir et mes brumes se dissipent, et le dégoût de la journée ratée te frappe de plein fouet...et des j'aurais-du m'assaillent de partout. j'aurais du bosser l'archi, du moins le test de mardi, ou ce rendu de demain, pourquoi j'ai pas fait de brushing, pourquoi je me suis pas bougée, pourquoi pas de footing.
lundi approche, lundi est là, qu'on me pose surtout pas ! cette question qui me scie ", dis, t'as fait quoi dimanche après-midi ?".

dimanche, février 3

ohm..home, homme(s)


j'ai jamais su comment !! comment font-ils pour passer sans crainte un rasoir sur leurs joues, un autosuicide quotidien qui finit generalement bien! j'ai jamais su comment, ils fument trois paquets par jour avec des expressos serrés et sucrés à outrance ! la mort du bon goût ! de l'estomac aussi... et puis ces bières qu'ils boivent, sans relâche comme si c'était trop bon, encore meilleur que l'eau!!
j'ai jamais su comment, ils restent des heures pour se coiffer alors qu'ils n'ont que deux cheveux ! et comment font-ils pour conduire si bien même quand ils sont imbéciles !
et le comble de tout, comment font-ils pour vivre avec de la vaisselle vieille d'une semaine, et des vêtements qui traînent, depuis des mois au sol, et la brosse a cheveux qui colle.

comment font-ils pour nouer leurs cravates, j'ai beau essayé et j'y arrive jamais ! des gestes inutiles répètés soigneusement, et encore, voient-ils des faux plis, indétectables à l'oeil nu !!
cette race inhumaine d'hommes sans grand H, me rend vraiment perplexe, ils ne regardent jamais l'horoscope du journal et s'en foutent éperdument des provisions du dimanche, courent pourtant après tous les décolletés et se souviennent rarement de leur dernière soirée...

les oubliés de l'histoire...


il y'en a beaucoup...ces gens qu'on voit sans voir... je parlerais d'eux, et seulement d'eux, ce qui touchent, sentent, entendent sans apercevoir...ils regardent a travers, leurs yeux sont des miroirs.
ces gens aux batons blancs qui serpentent comme nous des villes qu'ils connaissent encore mieux que nous. ils sentent le bruissement des feuilles d'automne, et quand vient l'hiver, ils entendent le bruit monocorde de la neige qui tombe et au printemps aussi, le chant des colombes et en été, sous le soleil de plomb, ils sentent la douce brise du vent et l'odeur iodée de l'eau salée. plus aveugles qu'eux...de tous les sens, nous n'utilisons qu'un , celui qui leur manque et ils en exploitent quatre, et un autre aussi que l'obscurité développe, comme une chauve souris..
leur cécité est une tare, leur manque de lumière nous rendrait peut-être fous, mais ils aiment ce monde, sans couleur, sans ombres et ils comprennent la valeur de l'or sans le voir, d'un ciel immense et bleu, d'un océan d'une mer...la beauté pour eux n'est pas une apparence, et s'ils ne voient pas, ils perçoivent enfin ce que le coeur recèle, comme le parfum d'une rose que la rosée exhale, ou le bruit millénaire qu'un coquillage entame, et le sable sous leurs pieds et la pluie sur les pavés...
ces gens pour qui le noir n'est pas une non couleur, pour qui le soleil nest pas lumière mais chaleur, il ne s'agit pas de ces orbites inutiles, ni de cet éclat perdu ni de ces lunettes noires qui cachent leurs yeux morts...il s'agit seulement de ce monde en noir sans blanc dont ils s'abreuvent et où ils vivent, de ces choses dont ils ne gardent que l'essence de la mémoire... de ces points en saillie qu'ils lisent, de leurs mains qui voient...
ça nous rend mal à l'aise de penser qu'on pourrait un jour ouvrir les yeux sans que la lumière soit, ça nous remplit de terreur, ça nous serre le coeur. et cet enfant né aveugle qui n'a jamais connu ce qu'est le vert d'un arbre ni le gris des nuages vit encore quand même et sourit aux passants et tend une main sûre à sa mère qui trébûche...