dimanche, février 3

les oubliés de l'histoire...


il y'en a beaucoup...ces gens qu'on voit sans voir... je parlerais d'eux, et seulement d'eux, ce qui touchent, sentent, entendent sans apercevoir...ils regardent a travers, leurs yeux sont des miroirs.
ces gens aux batons blancs qui serpentent comme nous des villes qu'ils connaissent encore mieux que nous. ils sentent le bruissement des feuilles d'automne, et quand vient l'hiver, ils entendent le bruit monocorde de la neige qui tombe et au printemps aussi, le chant des colombes et en été, sous le soleil de plomb, ils sentent la douce brise du vent et l'odeur iodée de l'eau salée. plus aveugles qu'eux...de tous les sens, nous n'utilisons qu'un , celui qui leur manque et ils en exploitent quatre, et un autre aussi que l'obscurité développe, comme une chauve souris..
leur cécité est une tare, leur manque de lumière nous rendrait peut-être fous, mais ils aiment ce monde, sans couleur, sans ombres et ils comprennent la valeur de l'or sans le voir, d'un ciel immense et bleu, d'un océan d'une mer...la beauté pour eux n'est pas une apparence, et s'ils ne voient pas, ils perçoivent enfin ce que le coeur recèle, comme le parfum d'une rose que la rosée exhale, ou le bruit millénaire qu'un coquillage entame, et le sable sous leurs pieds et la pluie sur les pavés...
ces gens pour qui le noir n'est pas une non couleur, pour qui le soleil nest pas lumière mais chaleur, il ne s'agit pas de ces orbites inutiles, ni de cet éclat perdu ni de ces lunettes noires qui cachent leurs yeux morts...il s'agit seulement de ce monde en noir sans blanc dont ils s'abreuvent et où ils vivent, de ces choses dont ils ne gardent que l'essence de la mémoire... de ces points en saillie qu'ils lisent, de leurs mains qui voient...
ça nous rend mal à l'aise de penser qu'on pourrait un jour ouvrir les yeux sans que la lumière soit, ça nous remplit de terreur, ça nous serre le coeur. et cet enfant né aveugle qui n'a jamais connu ce qu'est le vert d'un arbre ni le gris des nuages vit encore quand même et sourit aux passants et tend une main sûre à sa mère qui trébûche...

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